Conférence philo : La philosophie du temps

Conférence philo : La philosophie du temps

En partenariat avec le CNRS.
En clôture du cycle de conférences Penser le temps, l’Espace Andrée Chedid accueille Christophe BOUTON, Isséen, professeur de philosophie à l’Université Bordeaux Montaigne, co-directeur du volume collectif Temps de la nature, nature du temps. Études philosophiques sur le temps dans les sciences naturelles, CNRS éditions, 2018, auteur de L’accélération de l’histoire. Des Lumières à l’Anthropocène, Seuil, 2022 et de Le temps de l'urgence, éditions Le Bord de l'eau, 2025.
Sur réservation, public adulte.
Conférence La philosophie du temps : vendredi 20 juin de 19h30 à 21h
Ci-dessous, retrouvez l'entretien de Christophe BOUTON sur sa future intervention :
Vous êtes déjà intervenu au sein de l’Espace Andrée Chedid. Que pensez-vous du projet de cet établissement culturel et de ses programmations philosophiques ?
J'ai déjà participé plusieurs fois aux programmations philosophiques et j'en garde un très bon souvenir, pour l'accueil de l’Espace Andrée Chedid et pour la qualité des échanges avec le public. Je trouve excellente cette initiative de proposer des séances de philosophie au public isséen sur des thèmes variés, qui changent chaque année. La philosophie a vocation à sortir des murs de l'université, et l’Espace Andrée Chedid offre un cadre idéal pour une telle démarche.
Votre conférence portera sur « philosophy of time » ou philosophie du temps ? En quelques mots de quoi s’agit-il ?
C’est un courant très actif de la philosophie de langue anglaise, apparu aux Etats-Unis et en Angleterre dans la deuxième moitié du XXe siècle, qui se donne pour objectif de penser le temps dans ses différents aspects physiques (par l’étude des sciences de la nature) et métaphysique (par l’analyse des concepts). Les questions posées sont par exemple : le temps existe-il objectivement dans la nature ou est-il une réalité purement subjective ? Est-il une entité autonome ou relationnelle, qui dépend d’autre chose pour exister ? Le temps a-t-il une « flèche », une direction ?
En quoi les avancées de la science ou de la technologie changent-elles notre manière de penser le temps ?
Je donnerai trois exemples. À partir de la fin du XVIIIe siècle, la géologie a permis la découverte progressive du temps profond, c’est-à-dire la prise de conscience que l’histoire de la Terre se déroulait sur une échelle de temps bien plus vaste que celle de l’espèce humaine, ce qui a pu favoriser une conception réaliste du temps (l’idée qu’il a existé avant l’apparition des êtres humains et existe donc indépendamment d’eux). Au début du XXe siècle, la théorie de la relativité d’Einstein a obligé les philosophes, en premier lieu Bergson à l’époque, à repenser la notion de présent. Enfin, dans un autre registre, les développement depuis les trois dernières décennies des nouvelles technologies de l’information et de la communication ont accéléré la tendance à quantifier le temps, et à chercher à l’optimiser, à le rentabiliser en permanence dans le monde du travail et la vie privée.
A-t-on vraiment affaire à une accélération de l’histoire comme le suggère le titre de votre dernier ouvrage ?
L’expression est trop générale pour qu’on puisse la valider comme telle. Ce que je soutiens dans mon livre, c’est qu’il existe certaines tendances historiques qui vont en accélérant, comme la dégradation de la planète par les humains, ce qu’on appelle dans la littérature spécialisée « The Great Acceleration » (la grande accélération). On peut par ailleurs considérer que les dernières années manifestent une forme d’accélération géopolitique globale puisque des événements graves et à impact mondial se succèdent rapidement : pandémie de Covid 19 (qui a entraîné un ralentissement généralisé des activités, aussi brutal que temporaire), guerre en Ukraine, guerre à Gaza, cascade des décrets de D. Trump, etc. Rien ne dit néanmoins que cette accélération ne va pas ralentir à un moment, rencontrer des contrepouvoirs, puisqu’il ne s’agit pas d’un destin qui interdirait toute résistance mais de processus liés à des décisions politiques.
D’où vient votre intérêt pour ces questions ? De l’étude de Hegel dont vous êtes aussi un spécialiste ?
En effet, de l’étude de Hegel j’ai retenu avant tout son intérêt pour l’historicité des pensées et de toutes les réalisations humaines (États, religions, œuvres d’art, etc.). Selon lui, tout individu, y compris le philosophe, est fils de son temps et sa tâche est de penser son temps, son époque dans des concepts. Hegel était un grand admirateur d’Héraclite, d’où l’accent qu’il a mis sur le temps, le devenir en toutes choses. Il faut reformuler, actualiser sa philosophie de la nature et de l’histoire, mais cela correspond à sa propre vision de la philosophie : un travail critique qu’il faut refaire à chaque époque.
Que vous inspire la prochaine programmation philosophique en 2025/2025 qui portera sur le prendre soin de soi, des autres et du vivant ?
C'est un thème important puisqu'il mobilise notamment la question des menaces qui pèsent sur la biodiversité et du nécessaire respect des autres êtres vivants. Il fait aussi écho à l'éthique du "care" qui s'est développée ces dernières décennies en Europe à partir des États-Unis. Il y a beaucoup à dire sur ce sujet.
Sur réservation, public adulte.
Conférence La philosophie du temps : vendredi 20 juin de 19h30 à 21h